Les grandes étapes polonaises

Une enlaçade sur le parvis de la gare de Berlin pour se dire au revoir et Marcellin rentre sur Paris tandis que je roule vers la Pologne. 

En quittant la capitale allemande vers la Pologne, je coupe le cordon fraternel. Maintenant il n'y a plus que moi et le reste du monde.

Marcellin, en bon grand frère, m'aura mis sur les rails de ce voyage.

Ce 30 Septembre 2019, c’est parti je m’en vais seul vers l’Est du monde. Un vent d'ouest me facilite les 64 km jusqu’à Fürstenwalde. Dans cette bourgade allemande je dors chez Peter, un néerlandais parlant le français. Et quelle drôle de coïncidence, il vient juste de se faire recruter par Allianz l'entreprise que j'ai moi-même quitté il y a un mois.

Nous sommes rejoints par Edy, un Kenyan vivant en allemagne depuis quelques années. Sa famille est resté au pays et il travaille pour leur envoyer de l’argent. Il me conte ses exploits de jeunesse sur le marathon avec un record de 2h15 ! Peter nous prépare un Bortsch, c'est une soupe à la betterave typique de l'Est de l'Europe. Nous parlons beaucoup d’histoire. Peter est un adepte de la monarchie, il me parle de son affection pour le kayser Guillaume II le dernier empereur allemand. Nous terminons le repas par une prière. Je ne suis pas pratiquant mais par politesse je me plie d’un “amen” avant d'aller me coucher. 

 

Je me réveille le 1er Octobre avec ma première avarie, une punaise s'est enfoncée dans ma roue. Novice en bicyclette je me rend avec Peter chez le réparateur du coin. Après ce léger retard matinal je peux repartir et entrer en Pologne par la ville de Kostrzyn.

Après 106 km je suis reçu dans l’humble appartement de Thomas et Michal à Gorzow Wielkopolski. Ces deux polonais m'accueillent comme un prince avec une banderole “Witamy'“ (“Bienvenue” en polonais). Michal est un féru de vélo et me partage son projet “Polska Bajeczna - Fabulous Poland”. C'est un voyage éducatif autour de la Pologne pour conter des histoires sur les légendes polonaises. Je prends un réel plaisir à écouter cet homme passionné de tant de choses. Il connaît si bien la Pologne, c'est admirable. Son rêve est de se lancer dans un tour d'Europe de six fois six mois. Nous partageons nos rêves de voyage une bonne partie de la soirée tout en épluchant ses petits carnets dans lesquels sont mentionnés ses prochains voyages. Cette nuit la, j’ai le droit à de l’affection animal, je dors en compagnie de quatre chats et d’un chien.

 

Le matin venant je repars une nouvelle fois sous la pluie. Plein de motivation je veux éviter les grands axes pour m’offrir une belle balade en forêt. Je navigue au milieu des cueilleurs de champignons et des longilignes arbres. Après trois heures de lutte sur des chemins sablonneux je récupère la nationale pour filer jusqu'à Szamotuły.

Après 112 km éprouvant, j’aperçois la gare de Szamotuły. Par curiosité je regarde les prochains départ et je n’hésite pas une seconde à acheter un ticket. Je m’épargne 34 km de route de nuit pour arriver à Poznan vers 19h. Dans cette ville étudiante, je suis accueilli par Sandra et Allan qui m'offrent un bout de carrelage pour la nuit. Le simple fait de dormir à l'intérieur est un luxe incroyable. Je passe la soirée avec Allan, passionné par la construction et des films de Louis de Funès !

 

Après une visite de la jolie ville de Poznan et un tour dans le Décathlon pour m'équiper contre le froid, je repars pour une nouvelle étape. Encore un long parcours de 114 km pour arriver à Konin.

J’arrive vers 19h chez une formidable famille polonaise composée de Pwyclekmy, Alice et leur fille Michelina. Nous dînons ensemble et ils me partagent leur quotidien de policier et de comptable. Les parents ne parlent pas anglais, Michelina se charge de la traduction toute la soirée. Je trouve cela si beau de leur part d’accueillir un voyageur dans leur bled qui me paraît si perdu dans le monde. Mais bon les rires viennent quand je leur montre mon village de 450 habitants.

Ces moments de partages font réellement du bien après ces longues journées fatiguantes. Mais a l’avenir je vais éviter de prévoir de si grandes étapes en étant attendu le soir. Les guiboles grincent !

 

Direction Łódź dès 7h30 ce matin là avec une pause à Uniejów après 50 km. Ce village polonais attise ma curiosité par la présence de tours HLM. Dans mon imaginaire les tours HLM sont aux abords des grandes villes et pas au milieu des villages d'agriculteurs. Ces batiments vieux, délabrés et grisonnants sont les vestiges du passage soviétique.

Je m'éternise deux longues heures dans ce village pour y changer mon pneu capricieux. Novice en bricolage, je m'efforce de suivre un tuto youtube. Une famille polonaise essaie de m'aider pendant que je bouillonne devant mon incompréhension de la mécanique. Les enfants virevoltent autour de moi, s'emparent de mes outils, et le tuto disparaît.

La malice d'un enfant a failli me faire perdre mon si précieux Iphone SE. Je garde mon calme, fini de changer ma roue et reprend la route. Après 115 km, j'arrive à Lodz et je me pose dans une auberge pour un repos bien mérité. 

Pour cette journée de repos, j'erre dans Lodz et divague dans la sublime Manufaktura ou sont abritées plus de 300 enseignes commerçantes. Je passe du temps à l'auberge avec deux moldaves Yvan et Valentin. En discutant, ils m'expliquent les rivalités entre ces pays de l'Est, le racisme qu'ils subissent en étant moldaves et souvent assimilés aux russes. J’écoute leurs récits et sympathise avec ces deux rugueux travailleurs en buvant le free-coffee de l'auberge. 

 

De retour sur le bicloune, 147 km au programme pour rejoindre la capitale polonaise. J'emprunte des chemins pour éviter les grands axes mais quelle plaie ! Les polonais ont la fâcheuse habitude de mettre du sable sur ces sentiers. Tête dans le guidon je dois pousser mon vélo. L'avantage d'être seul, c'est que je peux m'en vouloir qu'à moi-même d'avoir pris cette fichue trajectoire. 

Durant ce Dimanche ensoleillé je prends conscience de l’attache religieuse des polonais. Outre les eglises, de nombreux crèches de recueillements aiguillent mon chemin.

Puis quelle joie d'arriver à Varsovie. J'adore entrer dans ces grandes métropoles en vélo. Je déambule dans le trafic au milieu de toutes ces lumières. J'ai le temps de me rendre compte de la grandeur de la banlieue avant d'arriver dans le centre ville. Une sensation d’aventure démente pour arriver jusqu'à mon objectif avec le sentiment du devoir rempli. 

Je vais poser mon vélo à Varsovie et prendre le temps d'aller vers Cracovie et Auschwitz.

Revivez cet article dans les deux vidéos ci-dessous :

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